IA, TA... un traducteur envisages les nouvelles compétences à adopter
Publié le 11 janvier 2024 ·  Edvenn

IA, TA… Quelles compétences pour percer sur le marché de la traduction ?

Il y a quelques semaines, le Translating Europe Forum 2023 explorait un thème qui nous est cher : « Achieving excellence in translation » (Atteindre l’excellence en traduction). Le forum est terminé, mais les vidéos des différentes interventions sont disponibles sur la chaîne YouTube « Translating for Europe ». Elles se font l’écho d’un marché de la traduction qui se demande où il va et comment y aller (avec quelles compétences notamment), au travers de nombreux témoignages de linguistes, de traducteurs et traductrices mais aussi de patrons d’agences de traduction. Vous y glanerez de précieux conseils pour orienter votre carrière de manière éclairée. Nous avons décrypté la table ronde intitulée « Skills for excellence » disponible ici et voici ce que nous avons retenu.

IA : produit concurrent ou super assistant pour les traducteurs ?

Il est clair aujourd’hui que l’intelligence artificielle va complètement remplacer toute activité courante et ordinaire de traduction. C’est même devenu un produit quasiment gratuit. […]

[En tant que traducteur], il ne s’agit pas de concurrencer ce produit qu’est l’IA, mais d’être le SEUL interlocuteur possible lorsqu’un besoin requiert un certain niveau d’excellence.

Seth Godin, dans son message vidéo enregistré pour l’UETF 2023 (Université d’été de la traduction financière) organisée par SFT Services et diffusé en introduction de cette table ronde.

Le langage est au cœur de la communication humaine… et du développement de l’intelligence artificielle (IA) générative. Cette dernière tisse sa toile à une vitesse fulgurante depuis la révélation de ChatGPT au grand public l’année dernière. L’engouement qu’elle suscite fait craindre le pire aux traducteurs et traductrices en activité ou en devenir, qui étaient jusqu’alors des parties prenantes incontournables des échanges internationaux. Ils observent maintenant de plus en plus de contenus produits ou traduits comme par magie, sans la moindre intervention humaine. Alors, que faire ? Comment réagir en tant que traducteur ou traductrice ? Le principal conseil que nous avons retenu tient en un mot : AGIR. Agir pour conserver la maîtrise  de la situation. Agir pour prendre le train en marche. Agir, enfin, pour se positionner autrement qu’en tant que simple produit concurrent de l’IA. Explications.

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Traducteur : viser l’excellence pour se démarquer de l’IA

Tous les intervenants s’accordent sur ce point : l’IA n’est pas en mesure de rivaliser avec une traduction humaine réalisée par un expert du domaine doté de compétences rédactionnelles indiscutables. Dès lors que l’on atteint un certain niveau de qualité, voire d’excellence dans son domaine de spécialisation, on se place hors de portée de la concurrence. Les formations de spécialisation proposées par Edvenn, qu’elles touchent au domaine médical, juridique, financière, technique ou marketing ont justement pour but de vous aider à vous démarquer en atteignant ce niveau d’excellence. Sur le sujet, nous retenons le témoignage éclairant de Lisa Rüth, traductrice financière et associée au sein d’une agence de traduction allemande :

Je travaille dans le domaine de la finance, c’est une niche. Une expertise en finance y est essentielle pour produire des traductions de qualité. En tant que traductrice financière, je dois parfaitement comprendre le sens du texte, son objet et son public cible. […] Ensuite, je dois rédiger, mettre tout cela en mots, donc en plus d’une expertise dans un domaine précis, je dois posséder d’excellentes compétences rédactionnelles. Cela implique par exemple de pouvoir jouer avec les mots et d’être capable de juger quand il faut être précis dans sa traduction et quand on peut se permettre de prendre des libertés.

Lisa RÜTH

La traduction générée automatiquement est loin de répondre au niveau de qualité minimal requis pour tous les projets, selon les intervenants. Ils nous invitent à l’envisager comme une solution intéressante lorsqu’elle correspond au besoin exprimé par le client : un (très) bas niveau de qualité attendu et pas de budget. En d’autres termes, fuyez le marché low cost. Ce n’est pas un terrain sur lequel vous gagnerez !

« Il y a de nombreux usages pour lesquels les sous-titres générés automatiquement suffisent. Cela ne veut pas dire que l’on a plus besoin de l’homme. Cela veut simplement dire que, pour certains projets, on peut s’en passer. Parfois, on s’appuie d’abord sur une traduction humaine. La machine peut alors intervenir a posteriori pour relever des erreurs. D’autres fois, la machine produit une première version des sous-titres, qu’un traducteur humain évalue et édite par la suite. Il n’y a pas de méthode absolue. L’heure est encore aux expérimentations.

Pablo ROMERO-FRESCO

Savoir utiliser les nouvelles technologies améliorer sa productivité en traduction

Autre sujet fédérateur lors de cette table ronde : les outils d’IA et de TA (traduction automatique) comme accélérateurs de productivité, voire en tant qu’assistants virtuels. Même pour les sujets les plus techniques qui ne peuvent pas être traduits de manière qualitative sans intervention humaine, le recours à ce type d’outils peut aider les traducteurs à travailler plus vite (en pré-mâchant le travail) ou les inspirer en cas de blocage, par exemple. À chacun de trouver le fonctionnement qui lui convient le mieux.

Avec la nouvelle vague technologique que représente l’IA générative, on observe que ces technologies peuvent jouer un rôle d’assistant pour aider les traducteurs à produire plus vite ou trouver de l’inspiration lors des pannes sèches. L’assistant virtuel pourra également être utile pour automatiser certaines tâches.

Et ceci ne se limite pas à la traduction. Cela s’applique à tous les domaines possibles pour tout type de tâche. Le gain de productivité potentiel est considérable.

Cristian BRAŞOVEANU

Aujourd’hui, le défi pour tous les linguistes serait aussi de « désapprendre ». C’est-à-dire d’arrêter d’essayer de faire comme avant en se contentant d’ajouter les nouvelles technologies à l’équation. Il s’agirait plutôt de remettre tout à plat et d’imaginer de nouvelles méthodes de travail. 

Quelles compétences pour les traducteurs dans le monde d’après l’IA ? 

Outre les compétences rédactionnelles ou linguistiques indispensables lorsque l’on souhaite devenir traducteur, l’essor technologique que nous vivons fait la part belle aux compétences humaines, émotionnelles, relationnelles et comportementales (souvent appelées les « soft skills »).

L’empathie est par exemple incontournable pour fidéliser son client, lui faciliter la vie et devancer ses attentes. L’ouverture, l’adaptabilité et la flexibilité donnent par ailleurs l’avantage de pouvoir réagir rapidement en période de changement. Mieux, elles permettent de faire plus facilement ce pas de côté pour aller explorer d’autres chemins et ouvrir sa carrière de linguiste. À ce sujet, nous vous invitons à découvrir ce travail de visualisation réalisé par Adam Wooten (et diffusé durant la table ronde). Aviez-vous en tête l’immensité du champ des champs des possibles pour votre carrière de linguiste ?

Le mot de la fin ?

La seule chose qui n’a pas changé sur le marché de la traduction, c’est la peur. En 2017, tout le monde avait déjà peur que ce soit la fin de la profession, et c’est l’histoire se répète aujourd’hui. Il faut arrêter de se concentrer sur ce que l’IA ne sait pas faire pour s’intéresser très sérieusement à ce qu’elle fait très bien et se demander comment en tirer profit.

Diego CRESCERI

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