Comment les clients vont-ils acheter de la traduction demain ?
Publié le 30 janvier 2025 ·  Edvenn

Prospective – Comment les clients vont-il acheter de la traduction ?

Partie 1 / 2

Alors que les pressions exercées sur le marché de la traduction s’intensifient, il est pertinent de se demander quelle part du gâteau reste disponible pour les traducteurs indépendants, qu’ils travaillent avec des clients directs ou via des agences de traduction. Pour cet exercice, nous avons chaussé les lunettes des clients acheteurs de traduction et regardé le monde à travers leurs yeux. 

Avant de rentrer dans le détail de leurs attentes et des tendances que nous anticipons,  nous avons établi une photographie factuelle du marché et de ses protagonistes. Sans surprise, nous y dépeignons un marché, comme beaucoup d’autres actuellement, en proie à de nombreux changements. Cependant, ce travail préliminaire permet de dépasser certaines idées reçues en mettant en avant les particularités d’un marché complexe et hétérogène.

Le marché de la traduction en 2025 : les ingrédients du changement

  • Un marché ultra-concurrentiel qui regroupe une multiplicité d’acteurs qui ne concourent pas à armes égales : freelances, petites et moyennes agences de traduction, sociétés de services linguistiques à dimension internationale, sans compter l’arrivée fracassante des IA gratuites.
  • Une série de faillites de grandes agences de traduction dont Slator se faisait l’écho cet été et qui montre que les difficultés peuvent toucher tous types d’acteurs dans  ce secteur.
  • Des traductions gratuites, accessibles à tous en un clic, mais peu précises et ne répondant pas à tous les besoins… notamment lorsque la traduction comporte un facteur de risque et requiert un certain niveau de qualité, nous y reviendrons.
  • L’évolution des types de prestations demandées : davantage de post-édition, moins de traduction humaine. Une tendance confirmée par l’analyse préliminaire relayée par Rudy Tirry, le directeur de l’étude ELIS en janvier 2025.
  • Une partie des traducteurs indépendants face à une situation financière qui se dégrade et exprimant une perte de confiance dans leur avenir (étude ELIS 2024). Dans le même temps, d’autres traducteurs témoignent d’une activité florissante et en croissance.
  • Un marché de la traduction et de l’interprétation en croissance constante depuis plusieurs années (environ 5 % par an) et des besoins en traduction qui n’ont jamais été aussi nombreux.

Avec cette photographie du marché en tête, nous avons observé les clients (les acheteurs de traduction), les traducteurs quelle que soit leur ancienneté dans ce métier et les agences de traduction. Nous identifions 3 tendances de fond qui vont façonner le marché dans les temps à venir pour les traducteurs et 3 compétences indispensables à acquérir pour s’élever au-dessus de la mêlée.

Tendance 1 Adieu la traduction standard

Alors que la traduction en quelques clics (ou moins) inonde le web et les applications, ce nouvel usage devient incontournable. Et le consommateur-lecteur applaudit. Au prix minime d’un texte parfois désagréable à lire mais globalement compréhensible, il a désormais accès à tous types de contenus et produits venant du monde entier. La fameuse barrière de la langue n’est plus, elle a volé en éclats. Rideau !

Ces nouveaux usages transforment la traduction en fonctionnalité. Une fonctionnalité qui se doit d’être intégrée nativement, proprement, partout et tout le temps. Chemin faisant, l’utilisateur s’habitue à lire des textes mal ficelés dès lors qu’ils lui ouvrent des portes gratuitement (mais surtout pas quand il paie un service ou un produit). Dans ce contexte, il est important de comprendre qu’il n’y a plus beaucoup de place pour des prestations de traduction humaines trop simples et que ce segment de marché, qualifié par certains traducteurs de marché de la traduction « de vrac » ou encore « low cost », celle qui ne demande pas d’expertise poussée, est actuellement trop exposé à la concurrence des IA pour y miser son avenir ou sa carrière en tant que traducteur indépendant. Las. Même si nous ne sommes pas dupes du véritable coût de ces avancées technologiques, le constat que nous partageons est implacable : oubliez aussi la traduction de vrac.

Tendance 2 L’amour du risque, un pari gagnant

En revanche, ce qui n’est pas près de changer, c’est que les clients qui ont un besoin de traduction précis, des contenus à enjeu ou porteurs de risques, se tournent toujours vers les experts en qui ils ont confiance. Ces clients là rejettent souvent la traduction automatique, conscients des défauts et des biais associés à l’utilisation de ces technologies. 

Pour illustrer l’idée, l’équation est assez simple du point de vue du client : si une traduction ne comporte aucun risque, alors il opte facilement pour une traduction automatique (post-éditée ou non, selon l’usage qu’il lui réserve). Si le risque est présent mais faible, il envisage une traduction de plus haute qualité. Enfin, si le risque engagé est élevé, autrement dit si la moindre erreur est susceptible d’entraîner des coûts importants, qu’ils soient financiers, humains, technologiques ou autres, alors, il investit dans une traduction de qualité sans sourciller. Dans tous les cas, pour le client et dans un contexte économique difficile, le coût de la prestation doit avant tout être proportionnel aux enjeux.

Pour viser les clients prêts à investir dans la qualité et s’imposer sur ces marchés, la principale question à se poser est donc « quels sont les risques qu’une entreprise n’est pas prête à prendre » ? 

a ) Les risques financiers

En matière de finance, les faux pas coûtent particulièrement cher. Au-delà des sanctions auxquelles s’exposent les groupes cotés en cas d’erreur ou de manquement à leurs obligations, il faut prendre en compte le pouvoir de la communication dans le monde financier, le coût faramineux d’une perte de confiance des investisseurs ou encore d’une crise mal gérée. On l’a encore vu récemment ici, les cours boursiers réagissent au moindre signal, positif comme négatif.

Exemples de contenus à risque dans le domaine financier : supports de communication à destination des investisseurs, rapports annuels, informations publiées par les sociétés cotées en matière de durabilité, rapports RSE, bilans comptables, instruments financiers…
Et demain ? Avec la mondialisation accrue des échanges, les besoins en traduction de haut niveau dans le domaine de la finance sont garantis.


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b) Les risques juridiques et légaux 

Dans ce domaine, la responsabilité qui pèse sur le traducteur peut avoir de lourdes conséquences : allongement ou annulation de procédures, orientation des décisions de justice… À titre d’exemple, les cabinets ne se privent pas de faire traduire leurs courriers d’avocat par DeepL. En revanche, s’il s’agit de traduire un contrat, ils optent le plus souvent pour une traduction humaine (ou, à tout le moins, pour une révision) car le risque pour leur cabinet et leur client est trop grand en cas d’erreur.

Exemples de contenus à risque dans le domaine juridique : textes législatifs, contrats de tous ordres, jugements, dépositions, documents liés aux fusions-acquisitions, aux successions…
Et demain ? Nous anticipons une demande stable voire en croissance, tirée ici aussi par l’internationalisation des échanges : le droit est partout ! 


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c) Les risques vitaux et médicaux

Si vous pouvez imaginer les conséquences de l’administration d’un traitement inadapté à cause d’une erreur de traduction automatique ou le poids d’un rapport d’expertise médical pour un assuré ou une compagnie d’assurance engagés dans la procédure subséquente, vous avez une idée des enjeux propres à ce domaine. En traduction médicale, les risques engagent la vie et la santé des individus tout autant que les finances des entreprises impliquées. L’erreur n’est pas permise. 

Exemples de contenus à risque dans le domaine médical : publications scientifiques, protocoles cliniques, dossiers médicaux de patients, notices de médicaments ou de matériels médicaux, rapports d’accidents, rapports médicaux, communications dans un contexte de crise sanitaire…
Et demain ? Nous ne projetons aucun événement susceptible d’entraîner une baisse de la demande dans le domaine de la traduction médicale.

d) Les risques commerciaux

Ici, le risque est tout autre. Moins dangereux pour les hommes, mais tout aussi vital pour les entreprises puisque ses conséquences s’observent directement sur leur chiffre d’affaires. Rater un lancement commercial représente un risque considérable. Dépenser des milliers d’euros en achat d’espace pour des contenus mal traduits est contreproductif et coûteux. Mal traduire un site e-commerce ou tout autre support promotionnel, altère parfois durablement une image de marque, la confiance des utilisateurs ou les ventes. 

Exemples de contenus à risque en marketing : lancement d’une nouvelle marque à l’international, site internet, offre commerciale, publicité, e-commerce et, de manière générale, tout ce qui peut impacter l’image de marque…
Et demain ? Ici aussi les feux sont au vert. Les IA et outils de TAO ne sont pas encore en mesure de traiter ces sujets de manière suffisamment qualitative ou créative (et selon certains chercheurs, les IA génératives approchent déjà du plafond de verre).

e) Les risques industriels

Dans le domaine technique, les industries dites « lourdes » (aérospatial, construction navale, construction d’infrastructures, exploitation minière, exploration pétrolière et gazière, raffineries, production d’acier, usines chimiques…) partagent des besoins incontournables, se plient à des obligations communes (la fameuse « directive machines » par exemple) et font face à des risques communs. Leur cœur de métier et leurs outils de production génèrent de multiples dangers au quotidien et engagent la sécurité de ceux qui les utilisent au quotidien, principalement leur salariés. Dans une centrale nucléaire ou à bord d’un avion long courrier, on ne badine pas avec la traduction du manuel d’utilisation. Sur un site industriel élaborant des produits chimiques, la sécurité est une priorité, tout comme la communication des messages de prévention qui y sont liés.

Exemples de contenus à risque en traduction technique : brevets technologiques, sécurité industrielle, sécurité alimentaire, qualité, conformité, documents confidentiels ou classifiés…
Et demain ? Les industries lourdes ne pourront s’affranchir d’un contenu à la fois précis et conforme. Les risques engagés sont parfois trop importants pour faire l’impasse sur la traduction humaine. 

Prendre le risque pour point de départ de sa stratégie change en profondeur le paradigme commercial du traducteur indépendant. Dès lors, comment procéder pour établir sa stratégie ?

  1. Identifier un risque.
  2. Positionner son offre en réponse à ce risque (discours commercial, prestations, secteurs de prédilections…).
  3. Sélectionner et démarcher ses prospects en fonction de ce prisme de façon personnalisée.
  4. Communiquer sur les succès et sur votre expertise grandissante (chiffres clés, retours clients…).

En procédant de la sorte, vous mettez toutes les chances de votre côté pour proposer une offre très engageante et répondant vraiment au besoin de vos prospects et clients, qui de leur côté sont prêts à investir pour limiter ces prises de risques aux impacts majeurs pour leurs sociétés.  

Tendance 3 – La créativité, toujours valorisée

Au-delà du risque, ce que l’IA ne gère toujours pas de manière satisfaisante, c’est tout ce que l’on regroupe sous le terme « traduction rédactionnelle », à savoir ce qui nécessite non seulement d’avoir une belle « plume » mais aussi le sens de la formule, une compréhension interculturelle fine, une capacité à nuancer, à saisir et retranscrire l’implicite ou encore l’humour. La différence entre l’humain et la machine, c’est que la machine va se demander comment (comment transformer ces mots dans la langue A en d’autres mots dans la langue B), alors que l’humain va se demander pourquoi avant de se demander comment (pourquoi ces mots en particulier, qu’est-ce qu’on cherche à faire, à qui on s’adresse) et proposer un texte qui produira les mêmes effets que le texte source, sans s’arrêter aux mots employés.

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Ces nuances et ressorts, nous les enseignons dans notre formation à la traduction marketing notamment puisqu’on les voit à l’œuvre dans la publicité, les sites internet, les articles de magazine ou encore les retranscriptions d’interviews. Nous sommes convaincus que ce segment de marché de la traduction, jugé (par certains) moins noble que la traduction juridique ou médicale par exemple, a de beaux jours devant lui en plus d’être stimulant intellectuellement. 

Fin de la partie 1.

💡 La partie 2 sera publiée en février…

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